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Entretiens relations extérieures

Farida CHAPMAN, International Rescue Committee, le 3 avril 2003

Est-ce que je pourrais demander tout d'abord de quel pays vous venez ?
Je suis italienne.

Pourriez-vous définir votre métier et rapidement décrire les principaux dossiers sur lesquels vous travaillez ?
En Mars 2001, l'office de l'IRC Belgique s'est ouvert grâce à mon initiative et mon idée et fin 2001 on est devenu une ONG belge.
Je ne gère pas directement de programme, mais je représente l'ONG à Bruxelles et j'essaie de maintenir des bonnes relations avec les bailleurs de fond.
Donc, mes tâches sont plutôt d'une nature administrative et budgétaire, générale et politique.

Pourriez-vous résumer votre parcours universitaire?
Quel a été votre parcours professionnel antérieur ? Comment avez-vous été nommé à ce poste ?
En 1997, j'ai commencé un Master aux Etats-Unis en Relations Internationales. En même temps, j'ai travaillé à l'école de droit sur les droits de l'enfant et leur protection dans le cadre d'un groupe de travail soutenu par le safe the children fund et je me suis spécialisée dans ce secteur. Puis, j'ai fait un stage d'été à VOICE pendant 3 mois en 1998. C'était un stage administratif. Pendant ce stage, il se formait une coalition contre les soldats-enfants à Genève et à New York et j'ai collecté des informations sur cette campagne dans / par une initiative personnelle. Les membres de VOICE étaient très intéressés par ce compte-rendu et par mon engagement et ils m'ont demandé de représenter VOICE aux Etats-Unis. J'ai accepté bien que ce travail ait été complètement bénévole.
En 1999, j'ai fini mon Master et, en ce moment, ECHO commençait de s'intéresser également aux enfants-soldats et voulait rendre cette problématique plus visible à travers une campagne dans des différents parlements européens. ECHO a alors demandé VOICE d'organiser cette campagne et comme j'avais fini mon Master et j'étais spécialiste dans cette matière, VOICE m'a donné un contrat pour 6 mois (avec une prolongation de 2 mois). En janvier 2000, l'exposition a eu lieu et était un grand succès.
ECHO voulait lancer une deuxième phase, mais à cause du prix des droits d'auteurs c'était trop cher.
En avril 2000, j'ai alors commencé de chercher un autre travail et en juin 2000 j'ai commencé en Sierra Léone comme child protection officer pour une ONG italienne (COOPI). J'ai passé 9 mois à Freetown (jusqu'en mars 2001).
Mais je voulais retourner à Bruxelles et comme j'avais remarqué que l'IRC n'avait pas d'office à Bruxelles, j'ai envoyé mon CV et une petite étude de faisabilité à l'IRC qui était appréciée
.
Que diriez-vous à un jeune qui souhaite exercer un métier dans le même domaine que vous ?Existe-t-il des prérequis ou un parcours obligé ?
Il faut cibler un secteur et s'approprier des skills supplémentaires. Il faut également montrer son engagement personnel.


BALKANS:

Quel est votre travail principal?
budget funding, lobbying, information, ...?
Est-ce que vous coopérez avec l'International Crisis Group?

Exactement, ces trois piliers : - budget funding auprès d'ECHO et de la Commission
- information (dans les deux directions, field > UE et UE > field)
- lobbying, advocacy
Mais quand je dis représentation, ça veut également exprimer que je représente les besoins des réfugiés.
On ne demande pas seulement d'argent, parce que - à mon opinion - il faut aussi y contribuer.
L'IRC est le leader pour la zone grise (zone entre l'humanitaire et le développement) et elle travaille surtout dans le cadre du programme CARDS et s'engage pour les enfants dans des conflits armés (VOICE et safe the children fund sont aussi fortement impliqués.)

Oui, on utilise de temps en temps les études de l'ICG qui bénéficie d'une grande crédibilité à Bruxelles. Mais les relations entre l'ICG et nos offices à Londres et à New York sont plus étroites.

Quels sont les acteurs (institutionnels et société civile) avec lesquels vous coopérez pour arriver à vos fins ? Et quel est l'impact de ces acteurs sur votre travail ?
Comme on est une ONG belge, on coopère surtout avec les institutions belges et dû à ma nationalité avec les Italiens.
La nationalité de l'ONG est importante.

Avec quels acteurs est-ce que vous avez des bonnes relations ? Avec lesquels est-ce que vous avez plutôt des relations conflictuelles ?
ECHO est l'agence de la Commission qui marche le mieux. Elle est sensible aux besoins des ONGs, parce que la plupart de son staff a des expériences professionnelles d'ONG. ECHO coopère le mieux. ECHO a ses field experts sur place pour l'évaluation et le contrôle des ONGs et pour échanger l'information.

ECHO et VOICE sont nées la même année. VOICE est le seul interlocuteur pour ECHO et bénéficie d'un mandat spécial. ECHO consulte VOICE quand il s'agit de nouveaux contrats avec des nouvelles ONGs.
Pour des petites questions, je consulte ECHO directement, mais p.ex. en ce moment avec la crise en Irak, ECHO est si surchargée qu'on ne peut pas les contacter directement, mais VOICE nous envoie chaque jour un update.

Avec le staff de la DG Relex, j'ai des expériences ambiguës. Les gens qui s'occupent des droits de l'homme sont magnifiques, mais …
Ce n'est plus la DG Relex qui gère les fonds, mais maintenant EuroAid. La DG Relex n'est responsable que pour la policy est les lignes directrices.

Une réforme / tendance nouvelle est la déconcentration, c'est-à-dire la Commission consulte sa délégation sur place. Le premier programme pilote a lieu en Bosnie où la délégation de la Commission sur place effectue la sélection des partenaires (système décentralisé). Sur place, elles connaissent mieux la situation. L'IRC commence déjà à ne plus présenter les papers à Bruxelles mais sur place auprès des délégations.

L'IRC est une ONG belge, mais fait partie du réseau de l'IRC. Comment ce fait se montre dans votre travail ?
Chaque office / ONG est indépendante et est gérée par un conseil d'administration.
L'IRC n'est pas organisé comme p.ex. CARE, dont chaque filière mène ses propres projets sur le terrain. Ainsi, des duplications sont inévitables.
Tous nos offices contribuent au même programme sur le terrain - notamment New York, Londres, Bruxelles et notre office en Hongrie qui va prochainement être ouverte.
L'objectif est une spécialisation de chaque office : Londres pour le post-conflit et la zone grise; Bruxelles pour la région des Grands Lacs.
Ce principe d'organisation nous aide à économiser l'argent.

A Bruxelles, on est à 2 dans l'office.
L'office à Londres a connu une très grande expansion de 300% l'année dernière avec maintenant 8 personnes qui y travaillent. C'était possible grâce au soutien venant d'ECHO.

En Belgique, une ONG doit attendre 3 ans pour être accréditée et pour avoir accès à un accord de cadre avec le gouvernement. Nous, on est maintenant à mi-temps (après 1,5 ans). Avec un soutien régulier du gouvernement belge, on pourrait aussi envisager un élargissement de notre office.

Est-ce qu'il y a une différence entre le travail à Bruxelles, à New York, dans le terrain, … ?
En gros, non. Mais il faut connaître les mots clés, qu'il faut utiliser auprès des institutions (p.ex. à New York post-conflict et à Bruxelles zone grise).
Il existe une similitude entre le travail à New York et à Bruxelles, parce qu'il faut toujours agir sur deux niveaux - auprès des Etats-membres et l'institution (notamment l'ONU et l'UE).

Est-ce qu'existe-il en ce moment un désaccord entre l'IRC et l'UE ?
Il y avait un problème avec le programme CARDS et les policies dans les Balkans concernant la transparence des contrats. Il n'existait pas de dialogue structuré entre la Commission et les ONGs et en demandant des questions précises l'IRC a initié un tel dialogue avec l'EuropeAide et la DG Relex qui étaitent et sont très ouvertes à ce dialogue.
Elles favorisent surtout un dialogue sur place, mais l'IRC demande aussi une coopération plus politique à Bruxelles avec plus de consultations et de transparence, parce que p.ex. pour la rédaction de la nouvelle version des country strategy papers, la Commission consulte parfois des ONGs et parfois non. Les critères de sélection des interlocuteurs etc. ne sont pas évidents.

L' IRC est finance par l'UE, le gouvernement hollandaise, l' UNHCR etc.


Quelle influence exercent ces institutions sur votre travail ?
Toute est politique et le plus important, c'est de sauvegarder l'espace humanitaire.
Certainement, les bailleurs de fond ont des objectifs, mais la nature des ONGs est de rester indépendante. Pour cela, elles essaient de diversifier leurs fonds et de jouir de différents bailleurs et d'un large base de fonds privés / d'individus.
Le but est l'exemple de MSF avec 80% de son budget financé par le privé.

Cette indépendance est aussi nécessaire pour avoir la marge de s'occuper également des crises oubliées, notamment en Uganda, au Kongo (avec le plus haut taux de mortalité du monde).
Mais ECHO est normalement consciente de ces crises.

Comment la période de transmission affecte-elle votre travail?
L'IRC travaille dans les Balkans depuis la guerre, d'abord surtout dans le secteur de l'infrastructure, et maintenant surtout en ce qui concerne le capacity building, aussi une priorité de la Commission et du programme CARDS. Il faut construire une société civile.

En Bosnie, l'IRC a un office local avec des employés locaux (le cas idéal). La transmission de la capacité rend possible la continuation du travail. Les objectives généraux sont: une économie plus stable, les droits de l'homme, faire confiance dans les institutions.

Pour les ONGs locales, il est très difficile d'avoir accès aux fonds de l'UE, parce qu'elle demande des obligations très lourdes, p.ex. des garanties bancaires.

Par conséquent, l'IRC agit comme "chaîne de transmission" et un bailleur interne ("les umbrella grants"). L'IRC reçoit des fonds pour un projet et effectue soi-même une sélection et distribue ses fonds à des ONGs locales.

NB : Le contenu de cet entretien reflète des points de vue personnels mais n'engage pas le IRC

 

CARL HALLERGARD, policy unit SG/HR de Solana, ancien chef de cabinet de la représentation de l'UE à Skopje, ancien de ECHO

Fonction

Suédois d'origine, Carl Hallergard travaille depuis 2000 à l'unité politique du Secrétariat Général du Conseil de l'Union européenne, autrement appelée UPPAR, Unité de Planification de la Politique et d'Alerte Rapide. Cette unité a été créée lors du traité d'Amsterdam, en même temps que le poste de Haut Représentant pour la PESC, occupée depuis l'automne 1999 par Javier Solana. Elle se compose d'un représentant par Etat membre, d'un représentant de la Commission, M. Hallergard en personne, et de 3 ou 4 représentants du SG du Conseil. Son mandat est défini dans la Déclaration N°6 du traité d'Amsterdam, et son but est d'assister M. Solana dans différents domaines de la PESC, essentiellement par l'intermédiaire de policy papers. Il s'agit en effet de proposer des actions de l'UE dans le domaine de la PESC. Carl Hallergard reprend les propos d'Hubert Védrine, soulignant qu'il n'y pas "une politique unique mais une politique commune" dans le deuxième pilier, pour mettre en exergue la difficulté de son travail qui consiste à expliquer aux Etats pourquoi l'Union a intérêt à avoir une PESC et à la développer. De même, le partage d'informations, même confidentielles, est indispensable pour une meilleure analyse. En ce qui concerne la chaîne de transmission, l'idée de départ émane des ministères des Affaires Etrangères et des délégations de la Commission sous la forme de télégrammes diplomatiques. Dans la pratique, les informations contenues dans ces derniers sont partagées de façon variée, mais quoiqu'il en soit, travailler au policy unit signifie exercer une fonction de soutien du représentant sur différents dossiers, et compte tenu des informations possédées.

Parcours universitaire et professionnel

C'est après avoir étudié à l'Ecole de Commerce de Stockholm puis à l'université en Suède en science politique et philosophie, que M. Hallergard passe un an au fameux Collège d'Europe à Bruges, l'année même où la Suède fait son entrée dans l'Union européenne. Il fait ensuite un stage de 5 mois à la Commission, dans le Cabinet de la Commissaire suédoise, pour s'occuper de dossiers du 3ème pilier. Cette première expérience professionnelle est complétée par 4 ans au sein de l'Office Humanitaire de la Commission, ECHO.
Au regard de ce parcours plutôt " classique ", M. Hallergard nous avoue ne pas avoir envisagé travailler dans un environnement proprement européen avant son passage à Bruges. Ce n'est qu'à partir de ce moment là, et manifestement motivé par l'entrée de son pays dans l'Union, qu'il s'oriente vers une carrière proprement européenne.
Il est intéressant de noter qu'il n'existe pas de procédure de sélection prédéfinie pour être recruté à l'UPPAR. Une fois l'unité constituée, ce sont les Etats membres qui proposent leurs candidats, lesquels sont sélectionnés par le Haut Représentant lui-même. Il s'agit donc d'une unité très particulière dans la mesure où son mandat se termine avec celui du Haut Représentant, en l'occurrence fin 2004, pour laisser la place à une nouvelle équipe.

Selon lui, travailler dans le domaine de la PESC nécessite une solide expérience dans son administration nationale, c'est-à-dire principalement travailler au Ministère des Affaires Etrangères pendant quelques années puis en ambassade. Il est également envisageable d'aborder le métier par les institutions-mêmes, puisque celles se caractérisent par essence par une mobilité forte. Ces deux approches, soit nationale soit européenne, impliquent bien sûr de présenter les concours, lesquels doivent, selon M. Hallergard, n'être envisagés que comme des alternatives parmi d'autres. Mais il existe selon lui une approche différente qui mérite toute notre attention. En effet, la voie d'accès par les ONG, les think tanks, les lobbies ou encore les cabinets de consulting, si elle semble peu prisée pour le moment, notamment dans le domaine de la PESC et plus généralement de la politique européenne dans le Balkans, s'avère être porteuse d'avenir. M. Hallergard mise ainsi beaucoup sur le développement de ce cercle d'organisations qui gravitent autour des institutions et qui sont, selon lui, amenées à être de plus en plus intégrées, à l'image du système américain. Cette dernière option n'est donc pas négligeable pour accéder à un poste de cette stature.

Position et rôle dans la chaîne de transmission de la politique dans les Balkans

M. Hallergard part d'un exemple concret pour bien nous montrer la spécificité de sa position et de son rôle dans la chaîne de transmission dans la définition et la mise en œuvre de la politique européenne dans les Balkans. Lorsqu'il s'agit de lancer une opération militaire, la chaîne de transmission est clairement définie : on réfléchit avec les militaires, puis on planifie une opération, ce qui suppose l'élaboration d'un document officiel présentant et défendant cette opération afin qu'elle soit lancée, ce qui se traduit concrètement sur le terrain. Les choses sont tout à fait différentes dans le domaine de la PESC car il y a toujours une politique, des actions passées qu'il faut bien entendu prendre en considération. La difficulté réside donc dans l'application d'une politique nouvelle dans le contexte d'une situation qui émerge et à laquelle il faut faire face.
Il nous donne l'exemple de la Serbie-Monténégro. Lors de la Présidence portugaise en 2000, l'Union a déclaré qu'elle, ainsi que les autres pays des Balkans occidentaux, fait partie des candidats potentiels à l'adhésion. On se trouve dès lors dans la première phase de la politique européenne à l'égard de ce pays. Néanmoins, Solana et son cabinet veulent poursuivre leur politique dans les Balkans en se prononçant contre l'indépendance du Monténégro et par conséquent pour le maintien de l'unité entre les deux entités. A partir de cette idée de base, il s'agit alors de présenter un document justifiant cette politique pour que celui-ci soit ensuite discuté au sein du Conseil des ministres. Eventuellement, les conclusions adoptées peuvent comporter un mandat pour voyager et faciliter les négociations entre la Serbie et le Monténégro. Néanmoins, la mise en œuvre est souvent très longue. De plus, des événements comme récemment l'assassinat du premier ministre serbe viennent sans cesse remettre en question la politique poursuivie et provoquer des changements d'attitude délibérés ou non. Quel est l'impact d'un tel acte ? Faut-il réfléchir autrement la politique vis-à-vis de ces pays ? Pour certains dossiers comme le statut final du Kosovo, les choses sont prévisibles par contre et il est donc possible de les anticiper. Ainsi, les Kosovars étaient très pressés de régler cette question avant l'assassinat du premier ministre, mais le Conseil est demeuré ferme dans sa position et a souligné la nécessité au préalable de remplir tous les critères.
En résumé, le SG et plus précisément l'UPPAR semblent se situer à différents niveaux du processus de décision, mais il serait peut être plus exact de le situer dans la phase prise de décision et mise en œuvre que réellement développement.

Partenaires et nature des relations entretenues avec ces derniers

S'occuper de la politique européenne dans les Balkans, c'est avant toutes choses travailler avec les pays de la région concernée, ces derniers étant donc des interlocuteurs de premier plan que l'on oublie trop souvent de citer : l'ARYM, la Serbie-Monténégro, etc. Il est donc important de connaître ces pays pour les conseiller et les influencer, même s'il faut bien reconnaître qu'en période de crise ces pays abritent des " acteurs positifs " désireux de collaborer, et des " acteurs négatifs ".

Ensuite, l'unité est en lien direct avec les Etats membres qui décident au Conseil mais également avec la Présidence qui a la charge importante de définir le programme et de présider les groupes de travail. Le Haut Représentant et la Présidence proposent aux Etats une politique européenne dans les Balkans mais les divergences nationales supposent la recherche incessante de compromis, ce qui suppose une certain degré de justification et de négociation de la part du SG. Si cela n'est déjà pas une tâche aisée, il est encore plus délicat de faire ensuite en sorte que les Etats collectivement s'entendent avec la Commission.

Celle-ci compte bien entendu parmi les interlocuteurs privilégiés de l'unité politique car il est vital que la politique de M. Solana soit en accord avec le travail de la Commission, et notamment avec le Processus de Stabilisation et d'Association dont elle a la responsabilité. Il y a donc une obligation évidente pour M. Patten et M. Solana de se mettre d'accord sur les grandes orientations de politique étrangère dans les Balkans. La Commission et l'unité politique participent souvent à des missions communes comme ce fut précisément le cas la veille à Belgrade. A la question de savoir s'il existe des rivalités avec la Commission, M. Hallergard nous explique qu'il ne peut exister " d'harmonie absolue " mais qu'il y a " une entente certaine ". Le rôle joué par les deux personnalités que sont Solana et Patten est crucial car ce sont eux qui donnent le ton à tout le monde par leur bonne entente. La coopération entre les deux institutions fonctionnent donc bien, ce qui n'est pas " grâce au système ", nous dit-il, mais plutôt " malgré le système ".

Les organisations internationales sont également très présentes dans le terrain des Balkans et constituent par définition des acteurs partenaires: ONU, OSCE, OTAN, Conseil de l'Europe. Si les buts sont plus ou moins commun, le chemin pour y parvenir peut diverger, il y a donc encore une fois nécessité de s'accorder. Les choses sont d'autant plus compliquées que tous les Etats membres sont membres de ces organisations et qu'ils doivent donc se coordonner en leur sein également. Si l'on parle parfois de rivalités avec l'OTAN dans le théâtre des Balkans, c'est à la fin toujours aux Etats membres de décider si l'opération militaire sera lancée par l'Otan ou l'UE. Cependant, il s'agit selon M. Hallergard d'une relation relativement nouvelle, entre deux organisations relativement puissantes, et celle-ci est donc amenée à se clarifier peu à peu. Le jeu d'influence du SG est plus important sur le terrain, dans la mise en œuvre et la gestion, une fois que la décision de lancer une opération est fermement prise. Les exemples de la Macédoine et de la Bosnie sont révélateurs. La question de savoir si l'UE va prendre la relève militaire de l'OTAN en Macédoine nécessite non seulement le consensus des 15, mais également de prendre en compte les positions des acteurs impliqués plus ou moins directement comme l'OTAN, l'OSCE, les USA, l'UE. La question est encore éminemment politique et délicate lorsque l'on considère la mission policière en Bosnie. Dans cette première phase de prise de décision, le SG et l'unité politique ont peu d'influence vis-à-vis de l'OTAN. Par contre, ils en ont bien plus pour ce qui de la mise en œuvre et de la gestion. En ARYM/Macédoine par exemple sont présents le Représentant Spécial, la Commission, le Moniteurs de l'Union européenne (EUMM), ECHO ainsi que de nombreux autres acteurs et les ambassadeurs des Etats membres. .
En ce qui concerne les relations que l'UPPAR entretient avec les ONG, celles-ci sont relativement peu structurées et fortes. En effet, elles n'ont pas un impact direct dans la mesure où elles sont absentes du processus de décision. Elles peuvent toutefois exercer une influence variable à travers leurs rapports. Si ces derniers s'avèrent utiles et intéressants, les rédacteurs peuvent être invités pour une discussion, ce qui n'a pas une portée exceptionnelle. Par exemple, M.Hallergard se souvient avoir été en désaccord total avec le European Stability Initiative sur la crise économique de 2004. D'autres acteurs extérieurs participent donc indirectement à la politique européenne dans les Balkans, notamment des think tank comme International Crisis Group, dont l'influence elle est amenée à s'accroître.

Son expérience précédente : chef de cabinet à la représentation à Skopje
ECHO task manager on refugee return issues

Carl Hallergard a également travaillé à Skopje pour Alain Roy, Représentant Spécial de l'UE, qui a succédé à François Léotard, nommé pour négocier les accords d'Ohrid. Ainsi, les liens entre le Haut Représentant et son équipe de même qu'entre le Haut Représentant et le Représentant Spécial sont privilégiés. La représentation à Skopje est composée d'une équipe de 6-7 diplomates détachés des Etats membres et qui travaillent dans des domaines différents. Carl Hallergard occupe alors le poste de chef de cabinet en charge de l'organisation du Bureau et des liens avec la SG. Sa tâche était donc de faciliter la mise en oeuvre des accords d'Ohrid signés en octobre. Dans le cadre de ses fonctions à Skopje, M. Hallergard nous dresse un tableau schématique de ses liens avec ses partenaires, en comparaison avec sa fonction à Bruxelles :

-Skopje : 60% avec les autorités locales - Bruxelles : 50% avec les Etats membres
30% avec les Organisations internationales 30% avec les OI
10% avec les Etats Membres 20% avec les pays

Sur place, il travaille donc avec les mêmes organisations mais plus précisément avec leur représentant : ex : le représentant de la force de l'OTAN. Et dans le cadre de l'opération Concordia, le bureau de l'OSCE, l'OTAN, la Commission, le bureau du Conseil de l'Europe, Le Haut Commissariat aux Réfugiés, la présidence de l'UE et les ambassadeurs restent les principaux acteurs de rang international.

En ce qui concerne la politique autonome de l'Union développée dans les Balkans, il faut noter que l'impact de la PESC ne se mesure pas à Bruxelles mais sur le terrain. Dans le cadre des accords d'Ohrid, l'UE coordonne le tout et son autorité est respectée par tous, y compris l'OTAN. Le chef de file à Skopje, c'est-à-dire le représentant spécial directement nommé par Solana bénéficie d'autre autorité sans faille sur le terrain. C'est d'ailleurs là que l'évaluation d'une politique est la plus pertinente, dans la perspective locale : l'accueil du Représentant de Solana dans ces pays par les presses locales, les habitants, les leaders locaux est tout à fait révélateur de l'aura dont l'UE bénéficie. Si le fonctionnement au niveau local de la PESC dans les Balkans semble optimal, il existe un grand contraste néanmoins avec la position de l'Union sur la scène internationale, sur des dossiers comme l'Irak, où la définition d'une politique commune s'avère malaisée.
Ce qui soulève la question de l'enjeu que représentent les pays des Balkans pour des organisations comme l'OTAN ou l'UE. En effet, dans les Balkans (et à l'Est en général), tous les pays veulent adhérer à l'OTAN, qui a donc une influence indéniable sur ces pays avec une situation géostratégique essentielle, mais il est à noter que ces mêmes pays souhaitent tout autant adhérer à l'UE. Par conséquent, quand les deux entités ont des points de vue différents, cela pose nécessairement des problèmes. Mais cela ne signifie pas pour autant que l'entrée dans l'OTAN ou dans l'UE s'exclue mutuellement. Au contraire, adhérer à l'OTAN peut sembler plus facile car moins contraignant pour des petits pays comme ceux des Balkans, et constituer en outre un argument de poids pour poser sa candidature à l'adhésion de l'UE. En bref, l'OTAN est un acteur politique clé même s'il n'a pas de politique étrangère en tant que telle.


 

Dominique LAPRAND, DG Relations extérieures, le 3 avril 2003

Pourriez-vous définir votre métier et rapidement décrire les principaux dossiers sur lesquels vous travaillez ?

Je travaille comme END (Expert National Détaché) à la DG RELEX à la Commission, qui est une interface politique entre les différentes DG mais également entre les institutions et les autres acteurs extérieurs qui s'occupent des Balkans. Ma fonction est de développer les politiques et programmes d'assistance pour transformer la politique et les institutions des pays des Balkans dans le domaine de la justice et des affaires intérieures (police). En réalité, mon poste n'existait pas et il a donc fallu que je définisse moi-même mon métier au sein de la Commission, en ce sens on peut dire que je suis un " précurseur " ! En effet, j'ai du à la fois faire l'inventaire des mesures déjà mises en place, puis définir une stratégie et la communiquer, un travail de longue haleine qui s'est déroulé sur trois ans, la troisième année étant celle de la première évaluation de la mise en œuvre des programmes créés.

Pourriez-vous résumer votre parcours universitaire ? Quel a été votre parcours professionnel antérieur ? Comment avez-vous été nommé ou recruté à ce poste ?

Après avoir fait Saint-Cyr et servi dans l'armée, j'ai passé le concours de la Gendarmerie, tout en faisant en parallèle une licence de droit, et suis entré à l'Ecole de Guerre pour la Gendarmerie. J'ai également suivi les cours de l'académie du FBI, de l'institut des Hautes Etudes de la Sécurité Intérieure (IHESI). C'est à l'Université de Dauphine que j'ai réalisé un DEA de sociologie des organisations, sur " La dynamique sociale du changement " plus exactement, ce qui me fut très utile pour travailler ensuite sur la Bulgarie et les Balkans.

En ce qui concerne mon expérience professionnelle, j'ai d'abord été officier de Gendarmerie en France, chargé de fonctions d'encadrement, où je suis passé d'une position de "middle management" à celle d' "executive position". Au cours de ma carrière française j'ai également servi au ministère de la Justice où j'ai traité des questions de police judiciaire. J'ai ensuite été expert sur la Bulgarie dans le cadre du programme PHARE. En effet, la Commission a fait un appel d'offre auprès des Etats membres pour recruter des experts en matière de police, et j'ai donc eu l'occasion de faire ainsi une mission d'évaluation de 10 jours, ce qui fut mon premier contact avec la Commission. Il s'agissait alors de faire une évaluation et des recommandations. Pendant une année, en plus de mes fonctions françaises j'ai poursuivi ce travail en définissant un projet de modernisation de la police bulgare. Ce projet a donc donné lieu a un appel d'offre lancé par la Commission et remporté par les Espagnols. J'ai par ailleurs travaillé avec la Commission dans le cadre du programme CARDS car elle recherchait des personnes expérimentées dans le domaine JAI, et notamment dans le développement des anciens pays communistes de l'Est, et ayant de bonnes connaissances du travail communautaire. Le recrutement s'est donc fait par le bouche-à-oreille puisqu'il s'agissait de sélectionner des experts dans ces matières spécifiques. J'ai ainsi obtenu le statut d'Expert National Détaché à la Commission (END), mais je reste colonel de gendarmerie dans le cadre national.


Votre formation vous destinait-elle à exercer un métier de l'Europe ? Et quelles sont vos perspectives de carrière à moyen et long terme (cadre national ou européen) ?

En conséquence, rien ne me prédestinait à ce poste à la Commission car c'est vraiment moi qui l'ai créé de toutes pièces, en jouant si l'on peut dire un rôle de précurseur.
A terme, une fois que la période " normale " d'environ 4 ans sera finie à la Commission car la " boucle sera bouclée " (1ère année : inventaire ; 2ème année : définition de la stratégie ; 3ème année : communication de la stratégie et premières évaluations), j'envisage éventuellement de rester dans un cadre européen ou international, et surtout compte tenu de la nature de la situation française actuelle dans laquelle la direction de la police, comme fonction, est accaparée par le corps préfectoral. Par exemple, les institutions européenne comme d'ailleurs le Pacte de Stabilité, l'OSCE et l'OTAN recherchent de nombreux experts de police et c'est une perspective qui pourrait m'intéresser.

Que diriez-vous à un jeune qui souhaite exercer un métier dans le même domaine que vous? (Par ex. existe-t-il des pré requis ou un parcours obligé pour exercer votre métier ?)

Avant tout, il est important d'avoir un background professionnel de qualité pour être bon dans un domaine technique. De même, on ne le dira jamais assez mais la maîtrise de l'anglais est fondamentale. Même si j'ai passé du temps aux Etats-Unis et ai pu acquérir un anglais courant, j'avoue avoir dû prendre à la Commission des cours de langues spécialement conçus pour les fonctionnaires et notamment pour la rédaction administrative qui est une tâche très spécifique. De plus, il ne faut pas oublier que les concours communautaires impliquent nécessairement une épreuve dans une langue communautaire autre que sa langue maternelle.


On peut alors passer au cœur du sujet, à savoir les Balkans. Si vous devriez décrire la chaîne de transmission de la définition et de la mise en œuvre de la politique de l'Union européenne dans les Balkans, à quel point de cette chaîne vous situeriez-vous ? Quel rôle jouez-vous dans cette chaîne de transmission ? (On se concentre plus particulièrement sur les 3 périodes de l'élaboration d'une politique : développement/prise de décision/mise en oeuvre)

Toute politique commune peut être vue comme une boîte, une boîte dont il reste à déterminer le format, le(s) destinataire(s) et la façon dont on la transmet à ce(s) destinataire(s). Toute chaîne de transmission se définit comme suit : état/situation =) analyse =) élaboration de la politique et du programme adéquat =) mise en œuvre, ce que vous résumez, vous, par " développement/décision/mise en œuvre).
Pour définir ma fonction et ma place dans la chaîne décisionnelle, je dirais que je suis " initiateur-animateur " car il y a dans mon métier un côté " entrepreneur " mais je ne vais jamais jusqu'à la réalisation concrète, confiée à une autre direction générale. Mon rôle se limite au jeu politique. En d'autres termes, il faut souligner que la DG RELEX n'est pas impliquée dans la dernière phase que vous évoquez, celle de mise en œuvre. Son action se situe plutôt au niveau des deux premières étapes où il s'agit de faire émerger une idée au sein du Conseil et de la Commission avant de la communiquer et de la défendre auprès des Etats membres. La DG RELEX, comme la DG JAI avec qui nous travaillons beaucoup, sont des DG dont la mise en œuvre est éminemment politique : les choix sont politiques à chaque étape (savoir si la politique est compatible avec Schengen, avec le système américain, avec Europol, etc) ce qui constitue bien sûr une faiblesse du fait du manque d'intégration. Conduire une politique c'est faire face à des obstacles en assurant la coordination la plus grande et la plus efficace.

Quels sont les acteurs avec lesquels vous coopérez pour arriver à vos fins ? Comment les influencez-vous ? Et quel est l'impact de ces acteurs sur votre travail ?

Pour bien comprendre l'environnement européen et les acteurs qui le composent, il faut garder à l'esprit un schéma très simple, celui de l'existence de trois cercles concentriques. En effet, au centre nous avons les institutions européennes, celles qui sont officiellement responsables des politiques et chargées de veiller à leur mise en œuvre. Autour de ce premier cercle viennent graviter des organes comme les représentations des Etats (membres, candidats, pays tiers), les comités (des Régions, Economique et Social, etc) . Enfin, ONG, lobbies, think tanks sont tous les organes qui cherchent à influencer ces premiers cercles de façon plus ou moins directe. La DG RELEX a donc bien évidemment des contacts avec tous ces acteurs pour développer sa politique européenne dans les Balkans.

En premier lieu, et au niveau de ce premier cercle, nous entretenons de nombreux contacts avec la JAI bien sûr, qui s'occupe de a lutte contre le crime organisé et qui relève d'un pilier intergouvernemental. Nous collaborons aussi beaucoup avec le Conseil et plus particulièrement l'unité politique du Secrétariat Général (M. Hallergard notamment) et avec M. Solana. Mais il faut prendre en compte que les intérêts défendus peuvent diverger : la Commission suit l'intérêt communautaire et c'est en ce sens que la DG RELEX est souvent considérée par ceux qui y travaillent comme une " citadelle assiégée " qui a du mal à forger des compromis, même si je dois avouer que ma position d'END me place un peu à part. Au niveau institutionnel tout d'abord, il y a donc deux acteurs clés dans cette politique des Balkans : le Conseil de l'Union à travers la policy unit en charge de la PESC et bien sûr le Haut Représentant pour la PESC M. Solana ; et la Commission, c'est-à-dire la DG RELEX à laquelle j'appartiens, mais aussi les DG JAI et AIDCO, ainsi que le Pacte de Stabilité qui sera bientôt " communautarisé ". Les circuits sont différents bien entendu mais le problème majeur réside dans le manque de communication entre les représentations des Etats membres, et même au sein de ces mêmes représentations, pour que les différents circuits se coordonnent.

De plus on peut regretter l'absence de représentations structurées dans les Etats des Balkans qui, s'ils s'avèrent sans aucun doute être des interlocuteurs importants, ne disposent pas toujours des moyens adéquats pour constituer des acteurs d'un poids égal.
J'ai aussi des contacts fréquents avec les différents représentants à Bruxelles, de même qu'avec les desks géographiques des Etats des Balkans concernés auprès desquels je suis un assistant et un conseiller. Au niveau de chacun de ces Etats, je reste en relation avec le Ministère de l'Intérieur, de la Justice, avec les Procureurs Généraux et les Chefs de Police également.

Pour ce qui est de mes interactions avec ce fameux " troisième cercle ", c'est-à-dire principalement les ONG et think tanks, il m'arrive de les rencontrer dans le cadre régional, et notamment certaines réunions sont organisées sur place avec des ONG s'occupant des droits de l'homme pour savoir quelle perception la société civile a des services de police sur place. Le rôle des ONG et leur impact sur le travail de la DG RELEX varient d'un service à l'autre. Les personnes de la DG qui sont chargées de consolider la démocratie en renforçant par exemple le rôle des médias sont plus sensibles aux ONG que moi, ce qui semble évident.
Pour ce qui est de nos sources d'informations, l'International Crisis Group joue un rôle non négligeable, mais je sais que la compétence technique dans le secteur JAI est essentiellement délivrée par le Etats membres, par l'intermédiaire des ministères.

Concernant les acteurs internationaux qui sont omniprésents dans la région des Balkans, l'OTAN est au premier plan. Je travaille notamment avec cette organisation sur la gestion policière des frontières contre les menaces criminelles (immigration illégale, trafic ou autres). Il faut aussi restreindre au maximum l'activité des bandes armées autour du Kosovo par exemple qui veulent s'opposer à l'UNMIK et lutter contre les Serbes. L'intérêt pour l'OTAN est certain dans la mesure où celle-ci est engagée dans le partenariat pour la Paix entre l'Albanie et la Macédoine tandis que l'UE est également impliquée et ce d'autant plus avec sa première mission en Macédoine. Les Etats membres ont beaucoup poussé, la France la première, pour que l'UE prenne la relève de l'OTAN. Mais si globalement il y a convergence de vue avec l'OTAN, les divergences sont plutôt internes à la Commission car beaucoup ne conçoivent pas de travailler avec des militaires pour contrôler les frontières or il y a un besoin réel de contrôle.

Vous vous êtes occupé du SPAI, (Stability Pact Anticorruption Initiative) et notamment vous avez fait partie du Managing committee. Ce dernier se compose de nombreux acteurs que nous venons d'évoquer pour la plupart, le Conseil de l'Europe, la Commission bien sûr, l'OCDE, l'office du Pacte de Stabilité, la Banque Mondiale, les USA…Pouvez-vous nous dire en quelques mots en quoi consiste ce pacte ?

En réalité nous avons plus une approche judiciaire mais je dois dire que je ne traite plus ce dossier.

Le rôle de l'UE dans les Balkans est en pleine évolution : à mesure que la région se stabilise, l'aide d'urgence et l'aide à la reconstruction consenties par la CE laissent la place à la promotion d'un développement durable et multiforme, visant notamment au renforcement des institutions. Ainsi, des programmes comme ECHO sont en train de se retirer peu à peu (pour laisser place à CARDS ou l'Agence Européenne pour la reconstruction). Pourriez-vous développer un peu plus ce changement de stratégie adoptée par la Communauté ? Quelles en sont les conséquences ?

Tout à fait, la Commission est chargée de mettre en œuvre le programme CARDS et elle doit pour cela adopter des stratégies particulières. En réalité, il s'agit plus précisément d'accords d'association, c'est-à-dire que les pays doivent s'engager à faire des réformes pour obtenir en contrepartie les fonds de l'assistance CARDS. Il existe à ce titre des programmes nationaux et des programmes régionaux.
Il s'agit en fait plus pour la Commission d'une étape, d'une transition et ce changement de stratégie est impulsé par le contexte et la stabilisation progressive de ces régions.
Si l'on prend l'exemple de la Macédoine, c'est le premier accord de stabilisation qui a été signé car il s'agissait à l'époque d'aller vite et de privilégier l'aspect politique et symbolique de ce geste sur la substance. Lorsque la crise a éclaté en Macédoine, les problèmes ont surgi et comme la Commission était très impliquée, elle a du débloquer un mécanisme de réaction rapide pour mobiliser des fonds dans le court terme pour répondre aux besoins les plus pressés.
En Bosnie par contre, le leadership est passé au Conseil avec la mission de police prise en charge par l'UE.
En fait, le problème avec les Balkans, c'est que des décisions variées sont mises en œuvre selon des logiques différentes. Plus généralement, l'UE se trouve dans ce cas précis dans une posture différente : il ne s'agit plus aujourd'hui de reconstruire la région mais consolider la démocratie en renforçant les institutions. On entre là dans la phase la plus délicate, car il faut pouvoir et savoir gérer le changement.


 

Sorin STERIE, pacte de stabilité, le 3 avril 2003

Tout d'abord, on voudrait vous demander votre nationalité.
Roumaine

Est-ce que pous pourriez rapidement définir votre profession et évoquer les pincipaux dossiers sur lesquels vous travaillez?
A la base je suis un diplomate travaillant pour le Ministère des Affaires Etrangères roumain. Je suis expert en questions de sécurité au Pacte de Stabilité pour l'Europe du Sud-Est. Je suis surtout responsable pour les affaires de justice et les affaires intérieures. Mon travail se concentre sur l'application du droit, la lutte contre le crime organisé (initiative SPOC), contre la corruption (initiative SPAI), contre le terrorisme et pour la coopération et la formation des forces de police.

Pourriez-vous résumer votre éducation universitaire? Est-ce que cette éducation vous a automatiquement conduit vers un "métier de l'Europe" ?

Mes études n'ont pas forcément été très typiques. En fait je suis un ingénieur. Je suis diplômé de l'Université Technique de Bucarest et de la faculté de droit de Timisoara. J'ai égalemet accompli un master en Droits de l'Homme sous les auspices des Nations Unies.

Quelle a été votre carrière professionnelle antérieure ?
J'ai commencé à travailler comme ingénieur dans une usine de mécanique fine, qui a produit pour l'armée. C'est ainsi que je suis venu à l'agence nationale pour le contrôle des exportations stratégiques, qui a été incluse dans les services du Premier Ministre. Après une réforme en 2000, l'agence a été transférée au Ministère des Affaires Etrangères. En tant que coordinateur national des affaires de sécurité je suis alors devenu candidat au poste d'expert au Pacte de Stabilité.

On peut alors en venir au cœur de notre sujet: La politique de l'UE dans les Balkans. Un grand nombre d'organisations internationales et de pays sont impliquées dans le Pacte de Stabilité, ce qui rend difficile la compréhension de son fonctionnement. Pouvez-vous expliquer comment marche la coordination?
Au départ le Pacte de Stabilité a été conçu comme une sorte de "toit" pour tous les acteurs impliqués dans les Balkans. Il faut se rappeler que le Pacte de Stabilité n'est pas une institution et non plus une organisation, mais un accord, une initiative. Donc le Pacte peut agir en tant que coordinateur. Mais il y a bien sûr des problèmes, car certains essaient de nous marginaliser. Mais l'initiative a l'avantage qu'elle ne concerne pas que les Etats de l'Union, mais tous les pays, incluant donc p.ex. les Etats-Unis et la Norvège ainsi que les organisations actives dans la région. Le Pacte de Stabilité peur favoriser des accords entre gouvernements. Les donateurs veulent savoir ce qui a déjà été fait dans la région et ce que d'autres sont en train de faire. Donc ils viennent chez nous s'ils ne veulent pas rester à un niveau bilatéral. Notre avantage est que tous sont des partenaires du Pact; nous assurons par notre coordination que tous ne font pas la même chose! Le dialogue entre les "joueurs régionaux" est crucial, car si nous oublions quelqu'un, cela peut poser des problèmes plus tard. C'est ce que font les 20 experts travaillant ici.

Comment coopérez-vous avec la Commission?
Il y a certaines complémentarités. La Commission couvre seulement les Etats membres et les Etats candidats. Bien évidemment elle dispose d'une section pour les Balkans, mais ils n'ont pas de personnel pour tout à la DG Relex. Les mécanismes internes à la Commission sont plutôt compliqués, mais nos contacts avec eux sont bons. Le développement des Balkans est devenu une priorté depuis le signal politique délivré sous la présidence grecque: tous les pays de l'Europe du Sud-Est deviendront membres de l'Union dans l'avenir.

L'UE a un rôle de leader dans le Pacte de Stabilité, mais elle n'est pas la seule organisationn internationale impliquée. Qui fixe l'ordre du jour? Quel est le poids de l'UE comparé à celui des Etats-Unis, l'OTAN etc.?
L'UE est certainement la forces motrice derrière le Pacte. Mais l'UE n'a pas d'armée, donc pour les affaires militaires nous discutons avec l'OTAN et la Banque Mondiale. Cette dernière aide à soutenir le processus souvent douloureux qui vise à reconvertir les bases militaires régionales, ce qui a beaucoup de conséquences sociales et économiques. Il faut chercher des utilisations civiles (hôpitaux, centres commerciaux etc.) pour les anciennes bases militaires.

Quels sont les autres acteurs avec lesquels vous travaillez?
J'ai déjà évoqué la Commission et les autres organisations internationales (tels que l'OSCE). Je peux aussi évoquer les coordinateurs nationaux des différents pays - les pays donateurs et receveurs. Il y a également certaines ONG tels que " Saferworld ", un think tank basé à Londres qui fait du lobbying en matière de sécurité (lutte contre le terrorisme et le crime organisé). Une perception fausse - mais fréquente - est celle d'un Pacte de Stabilité qui distribue de l'argent. Les gens ne savent souvent pas que le Pacte lui-même n'a pas d'argent à donner! Cette mauvaise perception est largement due à une certaine propagande au des débuts, lorsque certains ont présenté le Pacte comme "deuxième Plan Marshall". En fait, dans le cadre du Pacte, les problèmes de la région son identifiés, et ensuite les mesures nécessaires sont prises en proposant p.ex. l'adoption d'une législation sur certains problèmes, ou la facilitation du dialogue régional, ou encore l'organisation d'une réunion régionale. Nous avons aussi des liens étroits avec le Centre régional de lutte contre le crime transfrontalier à Bucarest.

Vous n'êtes pas un ressortissant de l'UE. Est-ce que ceci influence votre travail et vos relations avec les institutions de l'UE? Est-ce que vous vous voyez comme un acteur d'une politique de l'UE?
Ici aux "working tables" du Pacte, les représentants de l'Europe du Sud-Est sont les égaux de ceux des organisations internationales qui fixent l'ordre du jour. Certains de mes collègues viennent de Croatie, de Macédoine et d'Albanie. En ce qui concerne la politique de l'UE - oui, je suis impliquée dans cette politique, mais très indirectement. Et d'une certaine façon je suis impliqué dans un processus qui favorise l'adhésion future des pays de cette région à l'Union.

 

Nicolas WHYTE, International crisis group

Tout d'abord, nous voudrions vous demander votre nationalité
Britannique et Irlandaise - je suis originaire d'Irlande du Nord.

Est-ce que pous pourriez rapidement définir votre profession et évoquer les pincipaux dossiers sur lesquels vous travaillez?
Depuis Mai 2002 je suis le directeur du programme Balkans au International Crisis Group (ICG). Le ICG est une organisation indépendante visant à prévenir et à résoudre des conflits à travers une analyse de terrain et le lobbying de haut niveau. Je suis responsable pour la coordination de la recherche de l'ICG sur le terrain, les analyses et les recommandations de politique en rapport avec les Balkans. Je suis à la tête d'un groupe de 12 personnes travaillant dans la région : quatre agents travaillant à plein temps à Skopje, Pristina, Belgrade et Sarajevo, les autres à mi-temps. Ces personnes accumulent des informations et font des analyses politiques. Pour faire cela ils sont dans une meilleure position que la plupart des gouvernements, qui ne disposent pas d'agents sur le terrain. La partie visible de mon travail est la publication de rapports. La différence par rapport à d'autres think tanks est que nous avons plus de réunions avec des responsables et nous défendons davantage nos causes (advocacy) auprès des Etats membres, des Nations Unies etc. Nous avons beaucoup plus de contacts avec les gouvernements ainsi qu'avec les médias.

Pourriez-vous résumer votre éducation universitaire? Est-ce que cette éducation vous a automatiquement conduit vers un "métier de l'Europe" ?
Je détiens un BA en sciences naturelles (1989), un M Phil en Histoire des Sciences (1991, Clare College, Cambridge) et un PhD en history et en philosophie des sciences (1997, Queen's University of Belfast). Ces études m'ont surtout donné une bonne faculté d'analyse.

Quelle a été votre carrière professionnelle antérieure ?
Ce qui m'a amené vers l'analyse politique était le fait que j'étais un activiste politique dans le British Liberal Party et le Ulster Alliance Party. J'étais recruté par le National Democratic Institute for International Affairs (NDI), une organisation américaine visant à renforcer la démocratie dans le monde, qui à ce moment-là voulait recruter quelques non-Américains. Quand j'ai travaillé pour le NDI, j'ai vécu en Bosnie et en Croatie en 1997 et 1998. Je suis ensuite devenu le manager en communication et chercheur au Centre for European Policy Studies (CEPS) à Bruxelles, où j'étais le principal analyste pour les Balkans publiant le mensuel Europa South-East Monitor.

Que diriez-vous à un jeune qui souhaite exercer un métier dans le même domaine que vous ?Existe-t-il des prérequis ou un parcours obligé ?
Comme le montre mon propre passé académique, il n'y a pas d'éducation absolument obligatoire. Mais un étudiant doit avoir un grand intérêt pour la politique. Il devrait aussi avoir eu une activité politique lui-même.

On peut alors en venir au cœur de notre sujet: La politique de l'UE dans les Balkans. Si vous devriez décrire la chaîne de transmission développement-décision-exécution de la politique de l'Union européenne dans les Balkans, à quel point de cette chaîne situeriez-vous votre action ?
Contrairement à ce que pensent beaucoup de gens, nous n'intervenons pas uniquement dans le développement d'une nouvelle politique. En fait nous intervenons à tous les trois niveaus.

Qui sont les acteurs impliqués dans la politique de l'UE dans les Balkans avec lesquels vous travaillez ?
A l'intérieur de la Commission il y a en général une personne qui joue un rôle de " meneur ". Dans le cas de la Macédoine, mon meilleur contact était l'ancien conseiller de Chris Patten.
J'ai également de bons contacts à l'Unité Politique du Haut Représentant pour la PESC.
Ensuite, des partenaires très importants sont les Etats membres de l'Union : surtout les trois grands (Royaume-Uni, France et Allemagne), mais aussi le pays qui détient la Présidence. En ce qui concerne la Présidence, il vaut mieux travailler avec l'expert de la Représentation Permanente à Bruxelles. Pour les " trois grands ", il vaut par contre mieux s'adresser directement aux gouvernements nationaux. Dans ce cas je ne parle pas aux Ministres, mais aux agents des " desks " sur les Balkans, faisant l'ébauche propositions et des notes de travail qui sont alors envoyées vers le haut de la chaîne de transmission au sein du Ministère.
Je dispose aussi de quelques contacts au Parlement européen, même si cette institution n'est pas très puissante en ce qui concerne les Balkans. La plupart des députés européens s'occupent de 3-5 dossiers très techniques en même temps. Quelques-uns s'intéressent aux Balkans et c'est avec ceux-là que j'ai des réunions pour influencer leurs rapports annuels.
Enfin, je peux aussi évoquer les ONG qui souvent s'inspirent de mes analyses. Il faut distinguer les think tanks et les ONG faisant des " campagnes " (tels que Amnesty International). Ces dernières disposent en général de leurs propres sources d'information.

Avez-vous des concurrents, i.e. des gens qui font le même genre de travail mais qui préconisent d'autres politiques que vous ?
Il y a la European Stability Initiative, fondée par des anciens collègues du ICG. Leur analyse est cependant beaucoup plus centrée sur les problèmes économiques que la nôtre, qui est plus politique. Le ICG ne fait pas d'analyse économique, notre mandat est différent. On essaie d'avoir une certain complémentarité. Leurs méthodes sont identiques aux nôtres, mais le ESI diffuse ses rapports plus que nous. Certaines autres organisations ont des opinions radicalement différentes des nôtres : ainsi le British Helsinki Human Rights Group est très opposée à des interventions extérieures dans les Balkans, ou encore le Comité International pour la Défense de Slobodan Milosevic. Mais ces organisations ont beaucoup moins d'influence que nous.

Qui prend l'initiative pour un rapport de l'ICG ? En tant que facteur influent dans le processus de formation des opinions à Bruxelles, est-ce que le ICG fait des recommandations de politique de toute manière pour l'envoyer aux responsables politiques, ou est-ce qu'il arrice que des acteurs vous demandent conseil sur un problème spécifique ?
Il s'agit de notre propre initiative. Bien sûr nous sommes financés par des gouvernements et des fondations (l'UE ne donne pas d'appui financier), qui parfois suggèrent certains rapports à nos agents sur le terrain. Mais c'est moi qui prend la décision. Par exemple, il y a deux problèmes sur lesquels je préfère ne pas écrire : Je ne veux rien publier sur le TPI de La Haye, car, comme un tel rapport serait plutôt critique, il aurait un impact politique négatif en renforçant des gens avec lesquels on n'est pas d'accord ! Un autre sujet sur lequel je ne veux rien publier est le crime organisé. Le ICG n'est pas la CIA, et nos propres agents sur le terrain ne peuvent pas prendre de risques. Nous avons déjà eu des raisons pour être inquiets de la sécurité de nos agents.

Le ICG dépend financièrement de gouvernements, de fondations et d'entreprises. Est-ce que cela met en cause son indépendance et influence des recommandations de politique ?
Aucun donateur n'est en mesure de nous interdire d'écrire sur certains choses. Je résisterais avec détermination une telle pression ! Il se peut cependant qu'un membre du comité envoie certaines suggestions sur ce qu'il faudrait mettre dans un rapport. Dans ce cas il se peut que je prenne en considération certaines idées (mais pas forcément toutes). Des contributions d'un insider concerné sont admissibles.

Comment est-ce que le ICG attire l'attention sur ses analyses et tente de générer du soutien pour ses recommandations de politique ?
Les rapports du ICG sont largement distribués par email et des copies imprimés aux responsables des ministères des Affaires Etrangères et aux organisations internationales. Ils sont aussi disponibles sur le site internet, www.crisisweb.org. Je prends aussi directement rendez-vous avec les responsables des gouvernements nationaux. Dans ce cas je suis en général accompagné d'un de nos agents travaillant sur le terrain. P.ex. on a organisé une telle mission l'année dernière en Suisse.

Les dirigeants nationaux et européens ont beaucoup de sources d'information. De la perspective d'un preneur de décision, quel est l'avantage des recommandations du ICG par rapport aux analyses faites par les représentants nationaux dans les pays des Balkans ?
Des petits pays n'ont en général pas beaucoup de moyens d'observation dans les Balkans. Les pays plus grands en disposent, mais leurs gouvernements veulent vérifier leurs informations en les comparant à d'autres analyses. Ils aiment les sources d'information alternatives.

De quels contacts disposent vos analystes sur le terrain (société civile, contacts dans le ministères etc.) ?
La société civile est bien sûr une cible majeure, mais j'évoquerais aussi des institutions tels que le Ministère des minorités ethniques en Serbie-Monténégro. Nous avons des relations étonnamment bonnes avec eux, car à travers nos rapports ils espèrent attirer l'attention internationale sur certaines affaires.

Est-ce que actuellement le ICG tente d'amener l'UE à faire des changements dans sa politique dans les Balkans ? Y a-t-il des dossiers sur lesquels les recommandations de l'ICG sont en opposition complète avec la politique de l'UE telle qu'elle est conduite aujourd'hui ?
Il y a certains points critiques que nous pouvons faire sur la politique de l'UE. Tout d'abord, il n'y a pas assez de ressources. L'UE devrait accorder davantage d'argent au soutien de l'ère post-Milosevic. En général l'UE fait du bon boulot et publie des rapports sérieux, mais il y a aujourd'hui plus de gens travaillant sur l'adhésion de Malte que sur le dossier croate ! L'UE devrait aussi offrir davantage d'étapes intermédiaires vers l'adhésion. Une autre critique concerne le problème du statut final du Kosovo, que l'UE devrait résoudre une fois pour toutes.

Est-il possible d'évaluer l'impact réel d'une recommandation du ICG sur la politique effectivement menée ? Pouvez-vous nous donner des exemples concrets où un rapport d'un ICG a eu un impact décisif sur la politique de l'UE dans les Balkans ?
Nous avons fait une fois une évaluation d'impact : environ 40% de nos recommandations sont effectivement réalisées. Ceci est la moyenne pour chaque think tank. Chacun de nos quatre agents de terrain a eu un succès. Par exemple en Macédoine nous avons réussi à mettre le problème de la corruption à l'ordre du jour. En Serbie, nous avons exposé les liens entre l'armée et le crime organisé, ce qui a eu des conséquences en politique internationale et a reçu une référence dans les conclusions du Conseil de l'Union. En Bosnie nous avons eu un succès en ce qui concerne le problème du retour des réfugiés avec notre recommandation de ne pas déclarer achevé le retour des réfugiés. J'ai aussi eu une contribution personnelle en Macédoine qui a influencé les accords de paix: les maires et les chefs de police doivent se concerter, pour que la police ne soit pas considérée comme un instrument de répression mais de community builiding. Je peux aussi mentionner un rapport important sur le nom officiel de la Macédoine [FYROM] qui a très influencé Skopje, Athènes et d'autres capitales. Nous avons montré que la solution de ce problème contribuerait la stabilité régionale.

Récemment Kofi Annan a suggéré dans un discours que le " travail de médiation et de leadership dans l'avertissement précoce et la prévention de conflit " du ICG a été essentiel. Y a-t-il eu des cas où le ICG n'a non seulement proposé des politiques, mais où l'un de vos collègues a été plus directement impliqué comme intermédiaire et médiateur ?
Nous faisons parfois du travail de médiation, mais ceci n'est pas vraiment notre mandat et nous essayons maintenant plutôt de l'éviter. Il est cependant arrivé que des gens du terrain se sont adressés à nous. Par exemple en Serbie du Sud, un responsable du gouvernement nous a demandé notre aide pour attirer l'attention sur un certain problème dans les institutions internationales. Mais la médiation n'est pas le cœur de notre travail.



 

Christoph SIEGERS, euventures consulting, consultant

Définition du métier

L'objectif d'euventures est d'assister - d'une façon individuelle, innovatrice et consultative - les institutions qui traitent les sujets formation, social, droits de l'homme, humanitaire et culture au niveau européen. Euventures consulting ne veut pas seulement être un cabinet de consulting qui offre des services personnels et exclusifs, mais veut également donner la possibilité aux institutions de réaliser individuellement leurs intérêts à Bruxelles. Euventures représente entre autres différentes institutions éducatives allemandes d'utilité publique, le centre de traitement pour les victimes de torture à Berlin, des ONGs comme medica mondiale, CCME (Churches Commission for Migrants in Europe) et la fondation Heinrich Böll. Son service est le management de projets - consultation politique - information - représentation.

Parcours universitaire
C.S. a étudié le droit en Allemagne. Il trouvait les études de droit horrible, mais à cause de son travail à Amnesty International il pensait que le droit servirait le mieux comme base pour un trouver un emploi plus tard. Les questions concernant les droits de l'homme sont le plus souvent liées à des questions juridiques.

Parcours professionnel
Pendant ses études, C.S. a déjà travaillé comme porte-parole pour Amnesty International en Franconie / Bavière. Ce qui était toujours évident pour lui, c'était le désir de former quelque chose et de travailler dans le secteur du social / des droits de l'homme.
Autrefois, il trouvait l'Europe ennuyeux et complètement sans importance. Pour des motifs personnels, il est allé en Belgique et plus tard à Bruxelles et il a fait l'entrée classique à travers les institutions en faisant d'abord un stage dans une représentation des communes allemandes (travail très ennuyeux), et après au parlement européen.
Ensuite, il a eu la possibilité de travailler comme assistant pour un député vert du parlement européen (membre du comité intérieur). Cette activité a attiré en outre son attention aux questions de l'asile et de la migration.
Dans le bureau du député arrivaient beaucoup de demandes d'institutions concernant la remise de pétitions auprès de l'UE et il se posait la question si le bureau pourrait apporter ce service ou non.De cela, l'idée émergeait de fonder une entreprise, qui met exactement ce service à la disposition. Avec cet arrière-plan, C.S. a fondé euventures consulting il y a 3 ans.
Professionnellement, il a depuis toujours refusé une réflexion purement commerciale. Le travail avec et pour des ONGs est plus varié et orienté vers d'autres objectifs. Jadis, il a aussi écrit des pièces de théâtre et il voulait simplement faire bouger quelque chose. Donc, les sujets l'intéressent personnellement.
Les employés d'euventures ont des arrière-plans professionnels tout à fait différents. Par exemple, Stephanie Diewitz, responsable pour les secteurs du humanitaire et des droits de l'homme, est d'origine journaliste.
Dans le cas de C.S., l'on pourrait donc dire, que il a créé soi-même son métier présent.
Selon lui, les " métiers de l'Europe " sont plus flexibles que ceux exercés au niveau national. A Bruxelles, beaucoup est encore en mouvement, ils se produisent toujours de constellations et des possibilités nouvelles. Beaucoup de ses collègues, qui se sont établis à leur propre compte, viennent de l'arrière-plan des institutions.

Perspectives de carrière à moyen et long terme
C.S. désire que son entreprise croisse et qu'elle coopère encore avec beaucoup d'institutions intéressantes. Il a également quelques idées comme p.ex. l'intégration du secteur de l'environnement.

Conseil à un étudiant / une étudiante
Selon, C.S. il ne faut pas seulement regarder les notes et les études, mais il faut faire quelque chose d'exceptionnel.
De toute façon, les CVs se ressemblent souvent trop.
Quand il reçoit des demandes de stage ou d'emploi, il regarde rarement les notes, ou alors tout à la fin. Des notes exceptionnelles lui font plutôt peur.
Mais si quelqu'un - à la place de faire des vacances en Italie - a préféré volontairement travailler dans un projet d'environnement en Asie pour sauver des tortues, il a plus de chance d'être embauché par euventures.
Il faut avoir de l'engagement social et ne pas penser seulement à l'argent.


BALKANS

La particularité d'euventures
Actuellement, euventures dispose de bureaux dans les villes suivantes:
- Bruxelles, avec 4 employés et 1 à 2 stagiaires
- Cologne, qui se concentre sur la politique d'éducation allemande, les organisations patronales et le social
- Berlin : une collaboratrice libre qui rédige les Newsletter et qui s'occupe du site web

Par conséquent, les domaines couverts par euventures sont actuellement : l'éducation, le social, les droits de l'homme, l'humanitaire et la culture.
Au début, il y a 3 ans, euventures a travaillé pour le Behandlungszentrum für Folteropfer in Berlin (BZFO) - centre de traitement pour les victimes de torture - et des institutions éducatives allemandes (bbw: Bildungswerk der bayerischen Wirtschaft - institution éducative de l'économie bavaroise; ESTA: Europäisches Bildungswerk - institution éducative européenne; ...). Une étroite collaboration existe également avec les églises, surtout avec le CCME (Churches' Coalition for Migrants in Europe). Maintenant, il travaille aussi pour la fondation Heinrich Böll et prochainement pour l'ENAR (réseau européen contre le racisme et la xénophobie)
Euventures travaille comme un cabinet de consulting avec des contrats de consultation, mais il se situe entre une entreprise et une ONG.
Il y a 10 ans, aucune ONG s'était laissée représenter par une entreprise " commerciale " et chacun a fait son truc. Cependant aujourd'hui, il existe une tendance de former des réseaux et de chercher du soutien professionnel.
En ce qui concerne les Balkans, euventures travaille pour l'ONG medica mondiale qui a des projets à Zenica (Bosnie), à Gjakove (Kosovo) et à Tirana (Albanie).
Un autre projet concret était la formation d'un réseau entre des organisations religieuses (Caritas, Diakonie) au sujet du trafficking.


Description de la chaîne de transmission
Les tâches d'euventures sont : représentation - contact - influence
Informer le public et faire connaître l'opinion publique aux institutions.
Contrairement à presque tous les autres acteurs non-gouvernementaux, qui dérivent en ce moment leur légitimation de leur participation à la convention européenne, euventures ne participe pas à ce domaine. Son travail concerne des projets concrets, mais pas de lobbying général.
Un autre point important de leur travail est la formation de réseaux, parce qu'il faut normalement avoir des partenaires transnationaux pour une demande auprès de l'UE (surtout en ce qui concerne le programme Phare et culture 2000).
Euventures a, par exemple, cherché des partenaires pour un projet de la Caritas au sujet du " trafic de femmes ".
Pour les projets dans les Balkans, il faut normalement avoir plusieurs organisations et partenaires. Il ne suffit pas toujours de se concentrer sur des réseaux, parce que les demandes sont souvent trop spécifiques pour qu'un réseau général puisse suffire.

Acteurs principaux avec lesquels il y a des interactions
Tout le spectre : Commission, Conseil, Parlement européen, Représentation permanente de l'Allemagne, ministères et l'administration à Berlin et à Bonn
Les contacts sont pris soit à la base de livres épais, pleins de cartes de visite, soit à la base du " grand livre bleu " qui contient toutes les adresses des institutions européennes.
Normalement, les institutions sont contentes d'apprendre des informations de la société civile, parce que elles sont parfois trop éloignées et perdent leur lien direct avec elle.
Selon C.S., les contacts sont fortement concentrés / polarisés sur le propre pays et la propre nationalité.

Sources d'information
Euventures écrit un propre Newsletter et des emails réguliers à ces clients.
La majorité des des informations vient de l'internet, mais les contacts personnels, les réseaux et une coopération perpétuelle sont également importants.

Relation avec les autres acteurs
En général, il existe une ouverture du coté des institutions européennes au travail d'euventures. La Commission est même plus ouverte que le Conseil. Il est aussi possible de parler directement aux députés du Parlement européen
On peut atteindre beaucoup quand on choisit le bon moment. En plus, il est important de savoir ce qu'on veut. Le lobbying est un art particulier.
A Berlin, les institutions sont dans l'ensemble plus fermées qu'ici.
Pour une organisation à Bruxelles, le plus important est premièrement de se faire connaître et puis / ou en même temps de déposer un bon projet.


Différences entre euventures et VOICE
Le réseau d'ONG " VOICE " représente ses membres et n'est pas capable d'offrir un service individuel comme euventures.
Euventures informe les organisations pour lesquelles on travaille d'une façon spécifique et liée aux projets, et s'occupe de la pétition jusqu'à la formulation concrète. Ce travail ne peut pas être fait par des grands réseaux, parce qu'il demande beaucoup de temps.
En ce qui concerne VOICE, elle jouit d'une position privilégiée auprès d'ECHO.
Euventures - comme cabinet de consulting - connaît des désavantages. En effet les ONG ont une meilleure réputation que les entreprises, parce qu'elles peuvent prétendre de parler pour la société civile.


Différence entre le travail d'euventures et le travail d'un cabinet de consulting classique
La majorité des cabinets de consulting travaillent dans le domaine de l'industrie. Là, il s'agit plutôt de questions stratégiques et moins de projets concrets.
Avec d'autres jeunes conseillers actifs dans la politique allemande et à Bruxelles, C.S. a fondé une " Gesellschaft für Politikberatung - degepol" (www.degepol.de) - société pour la consultation politique - , dans laquelle ils veulent développer un Code of conduct. Au sein de cette société, il y a également quelques cabinets de consulting industriel.
Euventures n'a pas de vrai concurrent, parce qu'il s'agit d'un petit marché. Le consulting s'est surtout développé en Angleterre, mais l'application de la méthode de consulting dans le domaine social est quelque chose de nouveau, peut-être même d'unique.
Cette orientation sociale pourrait être quelque chose typiquement allemand.

 

 

 

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